Le Décret 2020-73 du 31 janvier 2020, JO 1er février et la circulaire CNAM 2020-9 du 19 février 2020 diffusent sous la forme de "questions/réponses" les modifications du droit du travail durant la période de crise sanitaire du Covid-19.
Le texte intégral est disponible sur le site internet du ministère du Travail (https://travail-emploi.gouv.fr/IMG/pdf/coronavirus_entreprises_et_salaries_q-r.pdf).
Les mesures essentielles :
En dehors du télétravail, l'employeur peut simplement imposer à un salarié à risque de rester chez lui, mais il doit alors lui verser sa rémunération.
L'employeur ne peut pas imposer la prise de congés payés (sauf 1 semaine tout au plus), mais il peut déplacer des congés déjà posés.
Un salarié qui fait l'objet d'une mesure d'isolement et se voit prescrire un arrêt de travail par les pouvoirs publics bénéficie des IJSS dans des conditions dérogatoires sans jour de carence.
L'entreprise contrainte de réduire, voire de suspendre son activité peut bénéficier de mesures d'aide, ainsi que d'un étalement des charges sociales et fiscales.
L'administration limite l'exercice du droit de retrait aux situations dans lesquelles l'employeur n'aurait pas pris les mesures de prévention et de protection nécessaires.
Obligations de l'employeur :
L’employeur a une obligation de sécurité à l’égard des salariés qui lui impose de prendre les mesures nécessaires pour protéger leur santé physique. Il doit notamment les informer lorsque des risques se présentent et mettre en place les moyens adaptés pour protéger au mieux les salariés (c. trav. art. L. 4121-1 et L. 4121-2).
-Il est conseillé aux employeurs d’informer les salariés par tout moyen adapté (mail, affichage, réunion) des mesures à respecter : gestes barrières, modification dans l'accomplissement des missions, modification dans l'organisation du travail ...
- Il est conseillé aux employeurs d’informer le comité social et économique (CSE), lorsqu’il y en a un dans l’entreprise.
-En cas de déplacement impératif, l’employeur doit s’assurer que le salarié met en œuvre les conseils préconisés sur le site du gouvernement dédié au coronavirus.
-Le télétravail est la solution à privilégier, dans la mesure du possible (Q/R 11 et 12). Les entreprises dotées d’un accord collectif ou d’une charte sur le télétravail pourront s’appuyer dessus pour adapter leur organisation. Même en l’absence d’accord ou de charte, le télétravail reste possible, par accord conjoint du salarié et de l’employeur. Il suffit pour cela de formaliser cet accord par tout moyen (c. trav. art. L. 1222-9), comme un échange de mail ou la signature d’un document ou, pourquoi pas, un échange de SMS. Le code du travail vise des situations exceptionnelles dans lesquelles le télétravail peut être imposé au salarié, sans son accord, « en cas de circonstances exceptionnelles (notamment de menace d’épidémie) » (c. trav. art. L. 1222-11). Le risque d’épidémie est un motif légitime d’imposer le télétravail.
-Si le télétravail n’est pas possible, l’employeur doit faire en sorte que le salarié évite (Q/R 11) :
les lieux où se trouvent des personnes fragiles,
toute sortie ou réunion non indispensable (conférences, meetings, etc.),
les contacts proches (cantine, ascenseurs, etc.)
- L’employeur peut déplacer des congés déjà posés par le salarié sur une autre période à venir pour couvrir la période actuelle, compte tenu des circonstances exceptionnelles (c. trav. art. L 3141-16) sans que cela ne dépasse 7 jours de congés imposés ;
-si certains jours de RTT sont librement fixés par l’employeur dans l’entreprise, celui-ci peut modifier leur positionnement en cours de période, dans le respect du délai prévu par l’accord collectif mis en place.
-Si un salarié a été contaminé, l’employeur doit procéder au nettoyage des locaux. À cet égard, il lui faut (Q/R 18) :
-soigneusement équiper les personnes en charge du nettoyage des sols et surfaces ;
-s’assurer que le nettoyage et le rinçage sont opérés correctement avec des bandeaux de lavage à usage unique.
- Les dispositions de chomage partiel sont évoqués dans un autre post.
Droits du salarié :
En cas de danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé, le salarié est en droit de suspendre son activité après avoir avisé l’employeur de ce danger (c. trav. art. L. 4131-1). Il suffit que le salarié ait un motif raisonnable de craindre pour sa vie ou sa santé pour qu’il déclenche la procédure d’alerte et de retrait (cass. soc. 23 avril 2003, n° 01-44806, BC V n° 136 ; voir RF 1109, § 1050).
L’appréciation se fait au cas par cas. Le document du ministère souligne que peut être considéré comme « grave » tout danger susceptible de produire un accident ou une maladie entraînant la mort ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente ou temporaire prolongée et comme « imminent », tout danger susceptible de se réaliser brutalement dans un délai rapproché (Q/R 21).
L’employeur ne peut pas sanctionner le salarié qui exerce ce droit et ne peut pas cesser de lui verser sa rémunération (c. trav. art. L. 4131-3).
En cas de suspicion d’abus, le litige ne pourra se résoudre que devant les juges.
Dans les circonstances actuelles, un salarié pourrait-il exercer son droit de retrait ? Oui, mais sous certaines limites.
Les possibilités de recours à l’exercice du droit de retrait en cette période de crise sanitaire sont « fortement limitées » lorsque l’employeur prend les mesures de prévention et de protection recommandées par le gouvernement.
Si l’exercice du droit de retrait est manifestement abusif, l’employeur pourra effectuer une retenue sur salaire. Par ailleurs, il pourra, selon le contexte, licencier le salarié pour cause réelle et sérieuse (mais pas pour faute grave) (Q/R 21).
Dès lors qu’un employeur suit les recommandations du gouvernement, le salarié ne peut a priori par invoquer le droit de retrait (Q/R 8).
Si un voyage professionnel est prévu dans une des régions à risque (Grand Est, Ile de France) un salarié estimant qu’il y a un danger grave et imminent pour sa santé pourrait, sous réserve de l’appréciation des tribunaux en cas de litige, refuser de s’y rendre en exerçant son droit de retrait. R&G Avocats
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